OTAN - Soixante-cinq ans d'histoire (1949-2014)

L'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), également appelée "Alliance [Nord] Atlantique", est une alliance politico-militaire résultant de la signature du Traité de l'Atlantique Nord, le 4 avril 1949. Le siège politique de l'OTAN est installé à Bruxelles/Haren, en Belgique, et l'organisation constitue un système dans lequel ses membres se sont mis d'accord pour organiser une "défense mutuelle" face à n'importe quel agresseur extérieur. Le Quartier-Général du SHAPE est quant à lui installé à Casteau, près de Mons.

L'Alliance avait pour vocation initiale d'assurer la défense et la sécurité de l'Europe de l'Ouest après la fin de la Seconde Guerre mondiale, face à l'énorme potentiel militaro-industriel que représentait alors l'Union Soviétique et le Pacte de Varsovie. Mais après la disparition de l'URSS et la fin de la Guerre Froide, ses structures et ses objectifs ont considérablement changé et évolué pour faire face aux nouvelles données géostratégiques du vingt-et-unième siècle.




Genèse de l'OTAN (1948-1949).

Le "Traité de Bruxelles" (Treaty of Brussels), signé le 17 mars 1948 par la Belgique, les Pays-Bas, le Grand-Duché de Luxembourg, la France et la Grande-Bretagne, est considéré comme le signal précurseur à la fondation de l'OTAN. Ce traité et le blocus soviétique de Berlin poussent les démocraties occidentales à la création d'une "Union de l'Europe de l'Ouest" (Western European Union) et de son organisation de Défense commune en septembre 1948. Cependant, la participation des Etats-Unis étant vitale afin de contrebalancer l'énorme puissance militaire de l'Union Soviétique, des pourparlers pour une nouvelle alliance militaire, considérablement élargie, se déroulent du 6 juillet au 9 septembre 1948. Ceux-ci débouchent finalement sur le "Traité de l'Atlantique Nord" (North Atlantic Treaty), signé à Washington, DC le 4 avril 1949. C'est véritablement l'acte fondateur de l'organisation, qui regroupe les cinq Etats du Traité de Bruxelles, plus les Etats-Unis, le Canada, le Portugal, l'Italie, la Norvège, le Danemark et l'Islande.

Photo ci-dessous: Harry Truman signe le Traité de l'Atlantique Nord le 4 avril 1949 à Washington, DC.


L'Article 1er du traité réaffirme la subordination de l'OTAN à l'ONU et le rôle important de celle-ci dans les relations internationales.

Les parties s'engagent, ainsi qu'il est stipulé dans la Charte des Nations Unies, à régler par des moyens pacifiques tous différents internationaux dans lesquels elles pourraient être impliquées, de telle manière que la paix et la sécurité internationales, ainsi que la justice, ne soient pas mises en danger, et à s'abstenir dans leurs relations internationales de recourir à la menace ou à l'emploi de la force de toute manière incompatible avec les buts des Nations Unies."

Mais c'est l'Article 5, définissant les mesures à prendre en cas d'agression de l'un ou plusieurs de ses membres, qui en est l'élément le plus significatif:

"Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre-elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre l'ensemble des parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d'elles, dans l'exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l'article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d'accord avec les autres parties, telle action qu'elle jugera nécessaire, y compris l'emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l'Atlantique Nord.

"Toute attaque armée de cette nature et toute mesure prise en conséquence seront immédiatement portées à la connaissance du Conseil de Sécurité. Ces mesures prendront fin quand le Conseil de Sécurité aura pris les mesures nécessaires pour rétablir et maintenir la paix et la sécurité internationales."


Les Etats-Unis rompent définitivement avec leur isolationnisme traditionnel et entrent dans une alliance militaire durable avec l'Europe occidentale. L'Union Soviétique, qui considère ce traité comme "un instrument de l'impérialisme américain", s'y oppose fermement. L'Alliance Atlantique va finalement être l'élément fondamental soudant le bloc occidental derrière les Etats-Unis, qui vont peu à peu installer une présence militaire permanente sur le continent européen.


Guerre Froide (1950-1990).

Le déclenchement de la Guerre de Corée en 1950 marque un épisode crucial dans l'histoire de l'OTAN. La menace grandissante de l'Union Soviétique et de ses pays "satellites" d'Europe de l'Est, qui se matérialisera en 1955 par la création du Pacte de Varsovie, force l'Alliance Atlantique à developper en urgence des plans militaires concrets.

En 1952, la Conférence de Lisbonne, cherchant à fournir à l'OTAN les moyens et les forces nécessaires à un solide plan de défense à long-terme, réclame 96 divisions. Cependant, cette demande sera ramenée l'année suivante à 35 divisions, avec une utilisation plus importante des armes nucléaires tactiques sur le champs de bataille. A cette date, l'OTAN dispose de 15 divisions opérationnelles en Europe centrale, ainsi que de 10 autres en Italie et en Scandinavie. Lors de cette conférence, le poste civil de "Secrétaire-Général de l'OTAN" est également créé, et le baron Hastings L. "Pug" Ismay, un général et diplomate britannique qui s'est illustré pendant la Seconde Guerre mondiale, est nommé à ce poste pour un premier mandat de quatre ans, de 1952 à 1956.

Un peu plus tard, en septembre 1952, débutent les premières manoeuvres navales multinationales de l'OTAN. C'est l'Opération Mainbrace, à laquelle prennent part environ 200 navires de guerre et 50,000 hommes, dans un exercice de défense du Danemark et de la Norvège.

Mais un évenement encore plus important marque cette fin d'année 1952. L'adhésion de la Grèce et de la Turquie à l'Alliance Atlantique entraîne une série de négociations controversées, dans lesquelles les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont joué un rôle prépondérant, pour intégrer les deux nouveaux Etats membres dans la structure de commandement militaire.

Pendant ce temps, alors que ces bouleversements militaires se produisaient, un plan visant à la mise en place d'une structure militaire clandestine (Stay-Behind), pour parer à une probable invasion soviétique réussie et initiée dès la fin de la Seconde Guerre mondiale par l'Union de l'Europe Occidentale, est transféré sous le contrôle de l'OTAN. C'est l'Organisation Gladio, dont l'existence ne sera publiquement révélée par le Premier ministre italien Giulio Androtti que le 24 octobre 1990. La nature secrète et clandestine des activités de Gladio, suspectée par l'extrême-gauche d'avoir mené une campagne d'attentats et d'actions meurtrières pendant les "Années de plomb" (1970s-1980s) en Italie, fait toujours actuellement l'objet de vifs débats et de controverses dans l'opinion publique internationale.

En 1954, l'Union Soviétique annonce l'idée qu'elle pourrait éventuellement rejoindre l'Alliance Atlantique pour "préserver la paix en Europe". Mais les membres de l'OTAN, suspectant que le but véritable de l'URSS est d'affaiblir l'Alliance, rejettent finalement cette proposition.

L'entrée de la République Fédérale d'Allemagne (RFA) dans l'OTAN, le 9 mai 1955, est décrit comme "un point tournant décisif dans l'histoire de notre continent" par le Premier ministre norvégien d'alors, Halvart Lange. Une raison majeure qui explique cette décision est que sans la puissance militaire de la RFA, il est pratiquement impossible aux forces terrestres conventionnelles de l'OTAN d'endiguer une invasion soviétique en Europe de l'Ouest. Dans les faits, à cette date, l'Allemagne fédérale représente de loin l'Etat membre européen le plus puissant militairement. Le nombre de divisions opérationnelles de l'Alliance Atlantique sur ce théâtre d'opération d'Europe centrale double pratiquement, passant de 15 à 29.

Photo ci-dessous: lors de l'entrée de l'Allemagne de l'Ouest dans l'OTAN, en 1955, la Bunderswehr fournit de loin les effectifs militaires les plus importants de l'Alliance Atlantique, pour défendre ses frontières en Europe Centrale.


La conséquence immédiate de l'adhésion de l'Allemagne Fédérale à l'OTAN est que de son côté, l'Union Soviétique réplique en créant le Pacte de Varsovie, ratifié le 14 mai 1955 par l'URSS, la Hongrie, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Bulgarie, la Roumanie, l'Albanie (qui s'en retirera en 1968) et la République Démocratique d'Allemagne (RDA). Dès lors, l'OTAN et le Pacte de Varsovie seront les deux "Blocs" antagonistes, symbolisant l'Ouest et l'Est, tout au long de la Guerre Froide.

Carte ci-dessous: les pays membres des deux alliances (OTAN et Pacte de Varsovie) symbolisant à eux-seuls la Guerre Froide.


Trois exercices majeurs sont menés au cours de l'automne 1957, les opérations Counter Punch, Strikeback et Deep Water, dans la plus ambitieuse coopération militaire de l'Alliance Atlantique jusqu'à cette date: 250,000 hommes, 300 navires et 1,500 avions opérant depuis la Norvège jusqu'à la Turquie.

Photo ci-dessous: le Task Group "Alpha" de l'US Navy, avec le groupe aéronaval Valley Forge, prend part à un exercice naval de l'OTAN dans l'Atlantique Nord en 1959. On distingue le porte-avions USS Valley Forge (CVS-45), deux sous-marins, sept destroyers, ainsi qu'une formation aérienne d'un P2V Neptune, de huit S2F Tracker et de trois hélicoptères HSS-1 Seabat. A ce moment, la marine de guerre américaine représente la force navale de loin la plus importante de l'OTAN.



Retrait français du commandement militaire intégré (1966-1995).

Après l'arrivée au pouvoir de Charles de Gaulle en 1958, débute la plus importante crise institutionnelle de l'OTAN de cette seconde moitié du vingtième siècle entre les Français et Américains, qui culminera huit ans plus tard avec le retrait de la France du Commandement militaire intégré.

Dès son entrée en fonction à la présidence, de Gaulle proteste contre le rôle et l'influence écrasante des Etats-Unis dans l'Alliance Atlantique, et contre ce qu'il perçoit comme des relations privilégiées entre Washington et Londres. Dans un mémorandum envoyé au président Dwight D. Eisenhower et au Premier ministre anglais Harold MacMillan le 17 septembre 1958, il demande la mise en place d'un "directorat tripartite" dans lequel la France aurait le même poids politique que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, et également l'extension de la zone géographique couverte par l'OTAN à l'Algérie, où l'armée française est alors engagée dans une guerre de contre-insurrection et demande l'assistance militaire de l'OTAN.

Photo ci-dessous: avion de reconnaissance RF-101 Voodoo du 66th TRS sur l'aérodrome de Laon-Couvron (1959).


En clair, de Gaulle espère que les forces de l'OTAN interviennent en Algérie contre le FLN. Considérant la réponse donnée comme non satisfaisante, il entame un programme de création d'une force de dissuasion nucléaire indépendante afin d'assurer son autonomie sur ses alliés. Programme qui se concrétisera deux ans plus tard, lorsque débutent les premiers essais nucléaires français à Reggane, en Algérie, le 13 février 1960. Le 11 mars 1959, la France retire sa flotte méditerranéenne du Commandement militaire de l'OTAN. Trois mois plus tard, en juin 1962, de Gaulle interdit le stationnement des armes nucléaires étrangères sur le territoire national. Washington commence le transfert des escadrilles de l'US Air Force in Europe (USAFE) hors de France et la rétrocession des dix bases aériennes dont les Américains, les Britanniques et les Canadiens disposent depuis 1950.

Bien qu'officiellement la France montre sa solidarité avec les Etats-Unis lors de la crise des missiles de Cuba, en octobre 1962, Charles de Gaulle poursuit sa politique d'indépendance en retirant ses navires des flottes alliées de l'Atlantique, de la Manche et de la Mer du Nord. En 1966, le "divorce" est définitivement prononcé et toutes les forces françaises se sont retirées du Commandement militaire intégré de l'OTAN. Retrait symbolisé par le départ du GQG militaire allié, ou Supreme Headquarter Allied Power in Europe (SHAPE), installé à Rocquencourt, dans la région parisienne, pour Casteau, près de Mons en Belgique, le 16 octobre 1967. Le siège central de l'OTAN, pour sa part, déménage de Paris/Fontainebleau pour Bruxelles/Haren. La France reste membre politique de l'Alliance Atlantique et conserve ses propres forces armées stationnées en Allemagne, elle continue de participer régulièrement aux manoeuvres bi-annuelles mais n'a plus aucun pouvoir décisionnel au sein du Comité militaire de l'OTAN.


Politique de détente et désarmement nucléaire (1963-1997).

Pendant la majeure partie de la Guerre Froide, l'OTAN a maintenu une politique de défense basé principalement sur la dissuasion nucléaire, ou "équilibre de la terreur", pour contrebalancer l'infériorité numérique de ses forces conventionnelles sur le Pacte de Varsovie. Cette notion de dissuasion consiste en la peur, dans les deux camps, de l'utilisation par l'autre de l'arme nucléaire. Dans ce cas, c'est le principe Mutually Assured Destruction (MAD, ou "Destruction Mutuelle Assurée") qui prévaut: l'agressé réplique avec les mêmes armes et, en raison de la puissance et des effets des armes nucléaires employé, chacun est pratiquement sûr d'être totalement détruit, ou au moins subir des dégâts très importants, si bien que les avantages d'être le "vainqueur" sont pratiquement nuls.

La stabilité de cette configuration, où les adversaires "se dissuadent" ainsi mutuellement, dépend avant tout de la capacité de l'agressé à riposter nucléairement après avoir subi une première frappe. C'est la "capacité de seconde frappe", élément moteur de la course aux armements nucléaires qui a opposé les deux superpuissances américaine et soviétique durant la Guerre froide.

Au début des années soixantes, après l'Affaire des "Missiles de Cuba" d'octobre 1962, où les deux blocs antagonistes ont frôlé une guerre nucléaire, on enregistre cependant le début d'une "Détente" et une volonté commune des deux superpuissances de réduire leur arsenal nucléaire. Le 5 août 1963, le mouvement est entamé avec la signature des Accords interdisant désormais les tests et essais nucléaires menés par les deux superpuissances. Suivent une série de rencontres au sommet, entre juin et octobre 1967, à Moscou, Londres et Washington, DC, aboutissant aux "Accords de l'Espace", ou Outer Space Treaty, qui interdit la militarisation de l'espace et la présence de bases de lancement de missiles sur la Lune, traité signé entre les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Union Soviétique.

Dans la foulée, entre les 23 et 27 juin 1967, le Premier Secrétaire soviétique Alexei Kosygin et le Président américain Lyndon Johnson entament officiellement la "période de détente nucléaire", lors de la Conférence de Glasborough, dans le New Jersey. Même si concrètement les pourparlers n'aboutissent pas à de réels progrès, cette tendance devient irréversible.

Photo ci-dessous: rencontre au sommet entre Lyndon Johnson et Alexei Kosygin, 23-27 juin 1967, lors de la Conférence de Glasborough, dans le New Jersey.


Le 1er juillet 1968, le "Traité de Non Prolifération Nucléaire", ou Nuclear Non-Proliferation Treaty (NPT ou NNPT), est signé à New York par les cinq puissances nucléaires d'alors que sont les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Union Soviétique, la France et la Chine populaire. Ce traité est basé sur trois principes fondamentaux:
  1. Non prolifération des armes nucléaires.
  2. Désarmement.
  3. Utilisation civile et pacifique de l'énergie nucléaire.
Les membres de l'OTAN, qui en 1971 dispose d'un maximum de 7,300 armes nucléaires tactiques en Europe (obus, bombes ou missiles sol-sol), commencent à réduire leurs stocks en 1972, après la signature des Accords de désarmement Strategic Arms Limitation Talks, ou SALT I, qui concerne les missiles ballistiques intercontinentaux et les armes biologiques. 6,000 armes à la fin de cette décennie, 1,400 en 1985, 700 en 1990, puis 480 en 1994, ces derniers n'étant plus exclusivement que des bombes B61 larguées par avions.

Photo ci-dessous: rencontre entre le président américain Richard Nixon et le Premier Secrétaire soviétique Leonid Brejnev, en 1973. Les deux dirigeants discutent sur les Accords de désarmement nucléaires SALT I, entamés l'année précédente.


Le 18 juin 1979, s'ouvre les Accords de désarmement SALT II, entre le président Jimmy Carter et Leonid Brejnev. Ces pourparlers concernent plus spécifiquement les missiles intercontinentaux de troisième génération SS-17, SS-18 and SS-19, ainsi que les "Véhicules de Rentrée et de Ciblage Indépendants Multiples", ou Multiple Independently targetable Reentry Vehicles (MIRV).

Photo ci-dessous: signature des Accords de désarmement SALT II, entre le président américain Jimmy Carter et le Premier Secrétaire Leonid Brejnev, en juin 1979.


Au début des années quatre-vingt, sous l'administration du président Ronald Reagan, c'est la crise liée au déploiement des missiles américains MGM-31 Pershing II en Allemagne et en Belgique, et la destruction du Boeing 747 des Korean Air Lines (Vol KAL-007). On note une légère et passagère réaugmentation de ces armes nucléaires. Durant cette courte période (1983), on parle alors de "seconde Guerre Froide" ou de "Guerre Fraiche".

Suivent les Accords de Désarmement Strategic Arms Reduction Treaty (START I), signés le 31 juillet 1991 entre les présidents américain George H.W. Bush et russe Mikhail Gorbatchev. START II, le 3 janvier 1993, entre les présidents russe Boris Yeltsine et américain George H.W. Bush. Et finalement START III, en 1997, entre Bill Clinton et Boris Yeltsine.

Photo ci-dessous: Accords de désarmement nucléaire START II, entre George H.W. Bush et Boris Yeltsine, le 3 janvier 1993.



"Après Guerre Froide" et extension de l'OTAN (1990-2009).

La fin de la Guerre Froide et la dissolution du Pacte de Varsovie en 1991 marquent une période de profonds changements et une profonde réévalution stratégique des structures, de la nature et des objectifs de l'OTAN.

En pratique, la fin de l'occupation russe en Europe de l'Est pose très vite la question de l'intégration des anciens pays "satellites" de l'URSS et des anciennes républiques soviétiques devenues indépendantes, dans l'OTAN.

Le premier acte de cette expansion de l'Alliance Atlantique vers l'est, c'est la réunification allemande le 3 octobre 1990. Pour rassurer la Russie sur l'intégration de cette nouvelle Allemagne réunifiée dans l'OTAN, les Occidentaux prennent l'engagement de ne stationner aucune force étrangère ou arme nucléaire dans l'est de ce pays, dans ce qui était autrefois la République Démocratique d'Allemagne (RDA).

La restructuration des forces militaires nationales des membres de l'OTAN dans cette période "Après Guerre Froide", l'intervention de l'Alliance Atlantique dans les conflits qui ensanglantent les Balkans, et un peu plus tard, son implication à la guerre anti-terroriste en Afghanistan, forcera celle-ci, en 2003, à restructurer complètement ses commandements et les modalités de déploiement de ses troupes, notamment en créant un "Corps de déploiement rapide", ou NATO Rapid Deplayable Corps.

L'OTAN créé également, le 2 octobre 1992, le "Corps de Réaction Rapide" du commandement alliée en Europe, ou Headquarter Allied Rapid Reaction Corps (HQ-ARRC ou ARRC), sous l'autorité directe du Supreme Allied Commander in Europe (SACEUR) avec son quartier-général installé à Bielefeld, en Allemagne.

La France réintègre le "Comité militaire de l'OTAN" ou NATO Military Committee en 1995, et depuis elle intensifie ses relations de travail avec les structures militaires de l'Alliance Atlantique.

En 2007, le président Nicolas Sarkozy entame une série de réformes majeures des forces armées nationales, qui culmineront le 4 avril 2009 avec le retour de la France, comme membre à part entière, au sein du Commandement militaire intégré, tout en conservant sa force de dissuasion nucléaire indépendante.


Missions de paix onusiennes et intervention dans les Balkans (1993-2009).

La première opération militaire de l'OTAN a pour origine la situation politique dans les Balkans et les conflits en ex-Yougoslavie. L'Opération Sharp Guard, menée de juin 1993 à octobre 1996, prévoit un renforcement des navires alliés présent dans la mer Adriatique, un embargo sur les armes et des sanctions économiques contre la République Fédérale de Yougoslavie (1992-2003), composée alors de la Serbie et du Monténégro, et dirigée par Slobodan Milosevic.

Le 28 février 1994, quarante-cinq ans après sa création, se déroule la première mission de guerre de l'OTAN: des F-16 Fighting Falcon de l'US Air Force abattent quatre MiG-29 Fulcrum serbes volant dans la zone d'exclusion aérienne décrétée par les Nations Unies au-dessus de la Bosnie-Herzégovine. L'Opération Deliberate Force, décidée après le massacre de Srebrenica (8,373 civils assassinés), vise des objectifs militaires (troupes, blindés, positions d'artillerie, sites SAM, ...) de la Republika Srpska dans et autour des "zones de protection" de l'ONU en Bosnie-Herzégovine. Celle-ci, effectuée du 30 août au 20 septembre 1995, impliquera au total environ 400 avions et 5,000 hommes de quinze nationalités différentes.

Photo ci-dessous: un F-16C Fighting Falcon du 31st Fighter Wing décolle de la base italienne d'Aviano, pour participer à l'opération Deliberate Force, en 1994.


L'Opération Deny Flight, les missions d'interdiction de l'aviation serbe dans la zone d'exclusion aérienne en Bosnie, démarre le 12 avril 1993 et se poursuivra jusqu'au 20 décembre 1995.

Photo ci-dessous: Opération Sharp Guard. Un F-15C Eagle du 53rd Fighter Wing s'apprête à décoller de la base d'Aviano, en Italie, pour une mission au-dessus de la Bosnie, en 1993.


Ces missions d'attaques et d'interception aériennes de l'OTAN contribuent fortement à la fin de la guerre dans l'ex-Yougoslavie et aux Accords de Paix de Dayton.

Photo ci-dessous: signature des Accords de paix de Dayton, dans l'Ohio. Novembre 1995.


Conformément aux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et à l'article 1er de sa Charte, l'Alliance Atlantique exécute ensuite l'Opération Joint Endeavor, des déploiements de "force de maintien de la paix" (Peacekeeping Force) nommée Implementation Force (IFOR) puis Stabilisation Force (SFOR), de décembre 1995 à décembre 2004.

Photos ci-dessous: 1° véhicule blindé Sisu XA-180 finlandais de l'IFOR en Bosnie. 2° Soldats allemands présents au Kosovo, en 1999.




Du 24 mars au 10 juin 1999, l'OTAN lance la plus importante opération militaire de son histoire. Pendant onze semaines, l'aviation alliée exécute l'Opération Allied Force, une campagne de bombardements visant les infrastructures militaires et industrielles, ainsi que les médias et les réseaux routiers et ferroviaires, en Serbie et au Kosovo. 1,055 avions et hélicoptères de treize pays y participent, dans l'intention de forcer les Serbes à retirer leurs forces militaires et paramilitaires de la "province rebelle", à mettre fin à la crise humanitaire dans les Balkans en permettant le retour des centaines de milliers de réfugiers kosovars chassés de leur foyer vers les pays voisins.

Photo ci-dessous: le Ministère de la Défense serbe à Belgrade est bombardé par l'aviation alliée en 1999.



Structures et organisation de l'"Après 11 septembre 2001".

Après les attentats terroristes du 11 septembre 2001, les Etats-Unis invoquent, pour la première fois de l'histoire de l'OTAN, l'article 5 de sa Charte, qui annonce explicitement qu'une attaque extérieure menée contre un de ses membres sera considérée comme une attaque contre tous. Cette invocation est confirmée le 4 octobre suivant quand l'OTAN annonce qu'elle mettre tout en oeuvre pour répondre à cette agression et punir les responsables. Cette riposte de l'Alliance Atlantique inclue les Opérations Eagle Assist et Active Endeavor, auxquelles participent les forces armées françaises.

La première, lancée le 9 octobre 2001, consiste en un déploiement et des vols de patrouilles aériennes de l'aviation alliée au-dessus des Etats-Unis et du Canada. Elle se poursuivra jusqu'au 16 mai 2002. La seconde, à laquelle prennent part également des pays non-OTAN comme la Russie, l'Ukraine, l'Egyte, le Maroc ou l'Algérie, est une opération navale conjointe menée en Méditerrannée, visant à renforcer la sécurité internationale et prévenir les mouvements de terroristes ou l'entrée d'armes de destruction massive dans les ports. Cette opération est toujours en cours de nos jours.


Malgré cette démonstration de force et de solidarité après le 11 septembre, il existent des voies dissonantes entre les pays membres de l'OTAN, particulièrement sur la guerre en Irak, et l'Alliance traverse une nouvelle crise majeure. Le 10 février 2003, la France, la Belgique et l'Allemagne opposent leur veto aux demandes américaines au sujet de leur aide pour assurer la défense de la Turquie, en cas de conflit avec l'Irak de Saddam Hussein.


Force Internationale d'Assistance et de Sécurité (ISAF, 2003-2009).

Par contre, en Afghanistan, l'unité et la solidarité des pays membres de l'OTAN se renforcent. Le 16 avril 2003, l'Alliance Atlantique se voit confier le commandement effectif de la "Force Internationale d'Assistance et de Sécurité", ou International Security Assistance Force (ISAF), qui était jusqu'alors sous la juridiction des Nations-Unies. Cette décision a été prise après une requête de l'Allemagne et des Pays-Bas, les deux pays qui assuraient alors le commandement conjoint des forces de l'ISAF dans le pays, et les dix-neufs ambassadeurs de l'OTAN l'approuvent unanimement.

Photo ci-dessous: soldat américain de l'ISAF dans la province afghane de Kunar, en 2009.


L'ISAF opère en Afghanistan depuis le 20 décembre 2001, en agissant sous mandat (Résolution 1386) des Nations Unies. En octobre 2008, 50,700 personnes provenant de quarante-et-un pays différents travaillent en Afghanistan. Liste des principaux contributeurs à l'ISAF: Allemagne, Australie, Belgique, Canada, Croatie, Danemark, Espagne, Etats-Unis, France,Italie, Jordanie, Lithuanie, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Royaume-Uni et Suède.

Le quartier-général de l'ISAF est établit à Kaboul, avec à sa tête le lieutenant-général (général d'armée) américain David D. McKiernan. Sa mission: "Conduire des opérations militaires dans la zone d'opérations pour aider le Gouvernement de la République islamique d'Afghanistan (GIRoA) dans l'établissement et le maintien d'un environnement sûr et sécurisé avec un engagement total des forces de sécurité nationales afghanes, en vue d'étendre l'autorité et l'influence du gouvernement, de manière à faciliter la reconstruction de l'Afghanistan et de permettre au GIRoA d'exercer sa souveraineté dans tout le pays."

Carte ci-dessous: localisation des différents contingents internationaux de l'ISAF, le 1er février 2010.

ISAF-Forces-2010


Elargissement à l'Est et restructuration (1990-2009).

Après la fin de la Guerre Froide, l'Alliance Atlantique profite largement du vide laissé par la disparition de l'Union Soviétique et du Pacte de Varsovie. Le premier pas est donné avec l'intégration de l'ex-RDA dans l'OTAN en octobre 1990. Le 12 mars 1999, la République Tchèque, la Hongrie et la Pologne deviennent membres de l'OTAN. Suivent le 29 mars 2004, les Pays Baltes, la Slovénie, la Slovaquie, la Roumanie et la Bulgarie. Et finalement, le 1er avril 2009, l'Albanie et la Croatie. L'OTAN accepte également les candidatures de la Bosnie-Herzégovine, du Monténégro et de la République de Macédoine, dans le long processus d'intégration au sein de l'Alliance.

Carte ci-dessous: le processus d'élargissement de l'OTAN dans les pays de l'ex-Pacte de Varsovie est entamé en 1990, avec l'ex-RDA.


Entre 1994 et 1997, plusieurs forums pour la coopération régionale entre l'OTAN et ses voisins voient le jour. Ce sont les divers "plans de Partenariat" tels que le "Partenariat pour la Paix", le "Dialogue Méditerrannéen", et enfin le "Conseil pour le Partenariat Euro-Atlantique".


Photo ci-dessous: cérémonie à Zagreb marquant l'entrée de la Croatie au sein de l'OTAN, le 1er avril 2009.



Etats membres de l'OTAN et Plans de Partenariat en 2009.

Le "Plan de Partenariat pour la Paix" (Partnership for Peace), créé le 10 janvier 1994, lie l'OTAN à la Fédération de Russie (22 juin 1994) et aux ex-Républiques socialistes soviétiques devenues indépendantes: Ukraine (8 février 1994), Moldavie (16 mars 1994), Géorgie (23 mars 1994), Azerbadjan (4 mai 1994), Turkmenistan (10 mai 1994), Kazakhstan (27 mai 1994), Kyrgyzstan (1er juin 1994), Ouzbekistan (13 juillet 1994), Arménie (5 octobre 1994), Biélorussie (11 janvier 1995) et Tadjikistan (20 février 2002). Ainsi qu'aux Etats de l'ex-Yougoslavie: République de Macédoine (15 novembre 1995), Bosnie-Herzegovine, Monténegro et Serbie (14 décembre 2006). Et encore d'autres pays européens non-OTAN: Finlande et Suède (9 mai 1994), Autriche (10 février 1995), Suisse (11 décembre 1996), Irlande/Eire (1er décembre 1999) et Malte (20 mars 2008).

Le "Dialogue Méditerrannéen" (Mediterranean Dialogue) de l'OTAN, lancé en 1994, regroupe pour sa part Israel, la Mauritanie, la Tunisie, le Maroc et l'Egypte (février 1995), la Jordanie (novembre 1995), l'Algérie (mars 2000).


Enfin, le "Conseil pour le Partenariat Euro-Atlantique", ou Euro-Atlantic Partnership Council (EAPC), est créé le 29 mai 1997 et prend la suite du "Conseil de Coopération Nord-Atlantique", ou North Atlantic Cooperation Council (NACC). l'EAPC regroupe au total 50 nations, les 28 membres de l'OTAN et les 22 pays du plan de Partenariat pour la Paix décrit précédemment.


En 2009, l'OTAN forme la plus puissante alliance politique et militaire du globe, réunissant désormais vingt-huit pays. Aux douze membres fondateurs de 1949, sont venus s'y greffer la Grèce et la Turquie (18 février 1952), l'Allemagne Fédérale (9 mai 1955), l'Espagne (30 mai 1982), ainsi que les anciens membres du Pacte de Varsovie et des pays de l'ex-Yougoslavie: la République Tchèque, la Hongrie et la Pologne (12 mars 1999), la Roumanie, la Bulgarie, la Slovénie, la Slovaquie et les trois Etats baltes (29 mars 2004), enfin l'Albanie et la Croatie (1er avril 2009).


Plan d'Action pour un Partenariat Individuel (IPAP).

Certains des pays du Plan de Partenariat pour la Paix bénéficient également du "Plan d'Action pour un Partenariat Individuel", ou Individual Partnership Action Plan (IPAP), un programme de l'Alliance Atlantique initié lors du Sommet de Prague en 2002, destiné à préparer et aider des candidats potentiels à avancer dans le processus d'une future adhésion comme membre de l'OTAN. C'est le cas de l'Ukraine (22 novembre 2002), de la Géorgie (29 octobre 2004), de l'Azerbadjan (27 mai 2005), de l'Arménie (16 décembre 2005), du Kazakhstan (31 janvier 2006), de la Moldavie (31 janvier 2006), de la Bosnie-Herzégovine (10 janvier 2008) et du Monténégro (juin 2008).

Photo ci-dessous: Donald Rumsfeld et Victoria Nuland, lors des consultations du sommet OTAN-Ukraine à Vilnius, en Lituanie, le 24 octobre 2005.



Défense anti-missiles et relations tendues avec la Russie (2002-2009).

Depuis 2002, les Etats-Unis négocient avec la Pologne et la République tchèque le déploiement de missiles anti-missiles et d'un radar de poursuite dans ces deux pays. Les deux gouvernements ont dépuis indiqué leur accord pour la mise en place du "Bouclier anti-missile" américain appelé Ground-Based Midcourse Defense (GBMD).

Le 14 août 2008, la Pologne, la République tchèque et les Etats-Unis ont finalement signé un accord préliminaire pour la mise en place des missiles anti-missiles sur le territoire polonais et du radar de poursuite sur le sol tchèque. Ce système GBMD devrait en principe devenir opérationnel en 2015 et être capable d'intercepter au-dessus de l'Europe des missiles ballistiques nucléaires lancés depuis l'Iran.


En avril 2007, les membres européens de l'OTAN ont indiqué qu'ils allaient mettre en place leur propre système de défense anti-missiles, en complément du système GBMD américain. Mais en réponse au déploiement du système GBMD en Europe de l'Est, le président russe Vladimir Poutine a annoncé qu'il considerait cela comme une provocation et une nouvelle course aux armements. Le Secrétaire-Général de l'OTAN, Jaap de Hoop Scheffer, riposte en proclamant que le bouclier anti-missile n'affecterait pas l'équilibre des forces en Europe ni ne menacerait la Russie.

Le 14 juillet 2007, Poutine déclare son intention de retirer la Russie du "Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe", ou Treaty on Conventional Armed Forces in Europe (CFE), signé en 1990 et censé limiter le nombre des armes conventionnelles. Cette décision sera effective 150 jours plus tard. La signature de l'accord préliminaire du 14 août 2008 entre les Etats-Unis, la Pologne et la République tchèque marque désormais une période de tensions politiques entre la Russie et l'Alliance Atlantique.

Photo ci-dessous: sommet OTAN-Russie, à Bucarest en Roumanie, le 4 avril 2008.



Article modifié le 20 juin 2016.


Sources principales:
North Atlantic Treaty Organization (Wikipedia.org)
Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (Wikipedia.org)
NATO North Atlantic Treaty Organization Homepage

1 commentaire:

Frédéric a dit…

Concernant l'opération Force Délibéré en Bosnie, en 1955. Je signale un volet terrestre souvent ignoré avec l'intervention de l'artillerie lourde franço-anglo-néerlandaise à Sarajevo :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_la_Bosnie-Herz%C3%A9govine_par_l%27OTAN_en_1995

Pour compléter l'article, notons la formation d'un unité de transport stratégique de l'OTAN ce mois ci qui sera à terme doté de 3 C-17 basé en Hongrie.